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MÉDECINS ET CUMUL D’ACTIVITÉS : OUI, MAIS … PAS TOUJOURS !

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L’article R.4127-26 du Code de la santé publique dispose qu’ « un médecin ne peut exercer une autre activité que si un tel cumul est compatible avec l’indépendance et la dignité professionnelles et n’est pas susceptible de lui permettre de tirer profit de ses prescriptions ou de ses conseils médicaux ».


Dès lors, sont proscrites les situations, même licites au regard du droit commun des affaires,

qui risqueraient de :


• Placer, de fait, le praticien sous l’influence d’intérêts économiques susceptibles d’orienter ses prescriptions, son diagnostic ou ses indications ;


• Porter atteinte à l’image de la profession et à un exercice de la médecine prudent et conforme aux règles déontologiques ;


• Porter atteinte à l’indépendance du professionnel de santé.


En d’autres termes, il convient d’éviter tout risque d’« autocompérage », c’est-à-dire toute situation dans laquelle le médecin pourrait, directement ou directement, orienter ses prescriptions vers une structure ou une activité qu’il exploiterait ou dont il tirerait avantage.


À titre d’exemple : des activités de fabricant/vendeur de dispositifs médicaux, opticien, ambulancier, dirigeant d’un établissement de soins, propriétaire d’un spa, d’un centre de

remise en forme…


La jurisprudence de l’Ordre des médecins opère une lecture au cas par cas, au regard de prétendus « risques concrets d’influence » des prescriptions ou conseils sur une activité contrôlée par le médecin ou dont il bénéficie. Ont ainsi été retenus :


• La compatibilité du cumul d’activité d’un médecin salarié d’un établissement (en l’espèce, une maison de repos) avec un mandat de direction au sein du même établissement, sans dépendance fautive par principe (cf. CE, 13 mai 1994, n° 123026) ;


• L’incompatibilité entre la fonction de médecin DIM (responsable de l’information médicale) et celle de dirigeant ou associé de l’établissement : l’Ordre considérant qu’il y a ici, par nature, une atteinte à l’indépendance professionnelle du praticien (cf. CE, 23 décembre 2011, n° 339529).

Ces dispositions ne doivent pas être négligées.


Rappelons en effet qu’un manquement à l’article R.4127-26 du Code de la santé publique est susceptible d’entraîner des sanctions ordinales. Qui plus est, en cas d’exercice en société d’exercice libéral (SEL), l’article R.4113-13 du Code de la santé publique protège également l’indépendance du professionnel de santé, et limite ainsi considérablement l’ouverture du capital des SEL de médecins à toute personne ou entité dont l’activité

serait de nature à générer une potentielle dépendance, à savoir :


• Toute autre profession médicale ouparamédicale ;


La profession de pharmacien d’officine ou de vétérinaire, ou la fonction de directeur ou de directeur adjoint de laboratoire d’analyses de biologie médicale ;


• L’activité de fournisseur, distributeur ou fabricant de matériel en lien avec la profession médicale, ou de produits pharmaceutiques, ou encore celle de prestataire de services dans le secteur médical ;


• Plus largement, les entreprises et organismes d’assurance et de capitalisation, ainsi que tous les organismes de prévoyance, de retraite et de protection sociale, obligatoires ou facultatifs.

Enfin, si vous êtes praticien hospitalier, des règles liées à votre statut d’agent public viennent s’ajouter à cette réglementation déjà dense, dès lors que vous êtes également soumis à la déontologie de la fonction publique.


À titre d’exemple, l’article L.123-7 du Code général de la fonction publique prévoit que :

« L'agent public peut être autorisé par l'autorité hiérarchique dont il relève à exercer une activité à titre accessoire, lucrative ou non, auprès d'une personne ou d'un organisme public ou privé.

Cette activité doit être compatible avec les fonctions confiées à l'agent public, ne pas affecter leur exercice et figurer sur la liste des activités susceptibles d'être exercées à

titre accessoire […] »


Or, l’article 25 septies, I, de la loi du 13 juillet 1983 précise, aux 2° à 4°, que :

« […] I. – Le fonctionnaire consacre l'intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées. Il ne peut exercer, à titre professionnel, une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit, sous réserve des II à V du présent article. Il est interdit au fonctionnaire :

1° De créer ou de reprendre une entreprise lorsque celle-ci donne lieu à immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, ou à affiliation au régime prévu à l'article L.613-7 du Code de la sécurité sociale, s'il occupe un emploi à temps complet et qu'il exerce ses fonctions à temps plein ;


2° De participer aux organes de direction de sociétés ou d'associations à but lucratif ;


3° De donner des consultations, de procéder à des expertises ou de plaider en justice dans les litiges intéressant toute personne publique, le cas échéant devant une juridiction étrangère ou internationale, sauf si cette prestation s'exerce au profit d'une personne publique ne relevant pas du secteur concurrentiel ;


4° De prendre ou de détenir, directement ou par personnes interposées, dans une entreprise soumise au contrôle de l'administration à laquelle il appartient ou en relation avec cette dernière, des intérêts de nature à compromettre son indépendance ;


5° De cumuler un emploi permanent à temps complet avec un ou plusieurs autres emplois permanents à temps complet. […] »


À la lecture de ces textes, le cumul d’activités entre un praticien hospitalier (agent public) et certains projets, notamment ceux de direction directe ou indirecte de sociétés, est également sujet à précautions…


Une nouvelle fois, vigilance est le maître-mot !


RECOMMANDATIONS :


• Prendre attache avec un avocat spécialisé afin de structurer vos projets d’exercice professionnel et d’investissement dans des activités où vos prescriptions pourraient être déterminantes pour la rentabilité de la structure ;


• Réaliser un audit annuel des différentes «casquettes » du professionnel concerné : les activités pouvant évoluer et devenir incompatibles, cet audit permettra de réagir et d’ajuster votre projet dans le respect de votre déontologie professionnelle ;


• Garder en tête que l’indépendance professionnelle doit toujours prédominer.

 
 
 
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